Sous le vent de la liberté - Christian Léourier

Publié le par Lester

 

 

 

Sous le vent de la liberté

 

Christian Léourier

 

Éditions Argyll

 

 

 

 

 

Xavier Dollo, alias Thomas Géha, en plus d'être un excellent auteur, se révèle un éditeur avisé et un homme de goût, et je suis fier de le compter parmi mes amis. Fondateur de la maison d'édition « Argyll », il a eu la gentillesse de m'offrir et de me recommander ce roman de Christian Léourier, « Sous le vent de la liberté ». D'habitude, je me sens peu motivé par les pavés, préférant le dynamisme des formats courts, aussi ai-je ressenti une légère appréhension à l'idée de me plonger dans ce gros volume de presque sept-cents pages, d'autant plus qu'il s'agit d'un roman d'aventures historiques, alors que mes goûts me portent davantage vers les littératures de mauvais genre.

 

Mais la maquette et la couverture sont sobres et élégantes, loin des photoshoperies tapageuses qui saturent les rayons des libraires, et en fait on découvre vite qu'on a affaire ici à trois romans révisés par l'auteur et rassemblés en une intégrale, ce qui me garantissait la possibilité de souffler au besoin entre chaque partie. Ce que je ne fis pas !

 

Je me suis donc embarqué avec joie dans le sillage de Yann de Kervadec, cadet breton et désargenté, qui à la mort de son père s'en va découvrir le vaste monde dans le but de retrouver son frère aîné, afin de restaurer son domaine spolié par des bourgeois avides de titres et de spéculation. Cette quête sur une trame classique ne sera que prétexte en réalité pour offrir au lecteur un splendide roman d'apprentissage et d'aventures. Enrôlé sur un navire de la Royale, notre héros picaresque se retrouve bientôt en route vers la Nouvelle-France, sur la piste d'un aîné bien ambigu. Il s'acoquine avec des trappeurs avant, (Tabarnak !) de se voir capturé par une tribu d'Iroquois qui l'adopte et le forme à la dure vie de coureur des bois.

 

Puis, Yann rencontrera quelques figures de la Guerre d'Indépendance américaine, dont Lafayette, avant de courir de nouvelles aventures parmi un équipage de négriers sur les côtes d'Afrique de l'ouest. Ensuite, il s'adonnera à la piraterie sur l'océan indien, ce qui lui permettra de côtoyer des rajahs en butte aux ambitions coloniales des puissances européennes. Enfin, il reviendra aux Antilles où il sera contraint d'assister à la lutte des esclaves contre les planteurs français, en attendant de regagner sa Bretagne natale, puis Paris, où la grande Révolution déchaîne la violence et les pires passions.

 

Il est quasi impossible de résumer en quelques mots le foisonnement d'aventures, de coups de théâtre et de personnages bien campés qui animent ces trois romans. Grâce à un style tantôt léger, tantôt dramatique, Christian Léourier pousse son lecteur à aimer chacun des acteurs de ces aventures, à apprécier leurs vertus et leurs faiblesses, dans un monde nuancé où nul ne s'avère totalement bon ou mauvais. À l'aide d'une documentation solide, il parvient à rendre tangible ce XVIIIe siècle si agité. La façon dynamique et imagée, « graphique » dont le récit avance m'a fait penser à ces BD d'aventures maritimes comme « Les Passagers du Vent » ou « L'Épervier », qui tiennent le lecteur en haleine tout en soulevant des sujets passionnants.

 

Car résumer ces romans à de banales histoires distrayantes serait une erreur. En plus de nous conter des aventures trépidantes, Léourier sait poser des thématiques universelles : humanisme contre égoïsme, Lumières contre obscurantisme, liberté contre esclavage, les personnages choisissent leur camp, déterminent leurs actes selon leur nature et en subissent les conséquences. Notre jeune héros, élevé dans l'esprit libertin et lecteur de Voltaire expérimente la dure réalité, mûrit et comprend que rien n'est simple ni tranché, mais toujours il court vers la liberté et vers plus d'humanité. Le tout est écrit sans manichéisme ni simplisme, avec une plume riche et vraie...

 

« Sous le Vent de la Liberté » restera pour moi une belle découverte, un de ces romans d'aventures qui donnent à rêver et à espérer, capables de redonner ce sentiment d'émerveillement, au même titre que « L'Île au Trésor » ou « Les Enfants du Capitaine Grant ».

 

Alors, n'hésitez plus, foncez chez Argyll, et, si vous ne craignez pas les embruns et l'air du grand large, cinglez en compagnie de Yann de Kervadec « Sous le Vent de la Liberté » !

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