Le dossier Arkham - Alex Nikolavitch
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« Le dossier Arkham » par Alex Nikolavitch
aux éditions Léha
Autre lecture rapportée de mes pérégrinations estivales aux « Mystériales » de Redon, voici un court (cent-cinquante pages environ) livre très atypique, devant lequel je suis tombé en arrêt aussitôt. En tant qu'admirateur de l’œuvre de Lovecraft, certains mots-clefs comme « Arkham » déclenchent en moi un genre de réflexe conditionné qui me pousse à entamer la conversation avec l'auteur, quand je l'ai sous la main, puis à feuilleter le bouquin avant de l'acquérir « quoi qu'il en coûte » comme dirait l'autre.
Bref, c'est nanti d'une dédicace que vous pouvez admirer sur votre blog préféré que je rentrai chez moi et commençai la lecture de l'objet en question. Il ne s'agit pas d'un roman de facture classique, car, en plus d'un récit narrant l'enquête et les derniers jours d'un détective privé découvert assassiné dans une chambre close, nous nous trouvons davantage en possession d'un véritable carnet mêlant illustrations, copie de (faux, bien sûr !) documents officiels, coupures de journaux et autres fac-similés de correspondances. Ainsi décrit, l'ensemble pourrait paraître confus, mais, étant donné que chaque fragment contribue à faire avancer l'intrigue, et que la mise en page est limpide, on se prend très vite au jeu pour dévorer ce « Dossier Arkham » avec appétit.
Tous les ingrédients d'une nouvelle d'H.P. Lovecraft se voient convoqués et exploités : secte mystique et mystérieuse, sombres entités n'attendant qu'une invocation pour ravager notre dimension, manuscrits allusifs lourds de menaces voilées, articles de journaux relatant de façon prosaïque des événements paranormaux, et personnages impuissants, comme manipulés par le destin, courant vers une fin inéluctable. Nous sommes ici en terrain de connaissance, et décrit ainsi ce livre pourrait sembler peu novateur, car on y retrouve des traits communs à « L'Appel de Cthulhu », et au « Cauchemar d'Innsmouth », entre autres. Alors, cette collection de thèmes et d'éléments pourrait paraître au premier abord dénué d'originalité, voire de créativité pour qui est familier de l’œuvre de celui qu'il est convenu d'appeler « le Maître de Providence ».
Mais il n'en est rien, heureusement ! Car, loin de constituer un hommage naïf et un peu servile à l'inventeur du Mythe de Cthulhu, ce « Dossier » se révèle un petit bijou d'érudition lovecraftienne et d'humour ! D'abord, parce que Alex Nikolavitch connaît son sujet sur le bout des doigts. Il exerce le métier de traducteur, et a ainsi contribué à la publication en France de la biographie de HPL par S. T. Joshi, et il a également scénarisé une BD retraçant la vie de notre auteur favori. C'est dire si l'individu en question maîtrise Lovecraft et son univers !
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Enfin, je sais que, à première vue, il est difficile de concilier la notion d'humour avec celle de « Mythe de Cthulhu ». C'est cependant la performance que réussit Alex Nikolavitch, en truffant son récit de références à la Pop Culture. De Sardou aux « Tontons Flingueurs », de Conan le Barbare à Indiana Jones, en passant par « John le Charpentier », les jeux de mots jalonnent le roman, et on se prend à recenser toutes les allusions, plus ou moins transparentes, qui parsèment l'histoire. Ainsi, en plus de développer une histoire pastichant avec talent le père fondateur du fantastique moderne, Alex Nikolavitch réussit à mobiliser l'attention de son lecteur en lui proposant un petit exercice d'érudition des plus distrayant.
Alors, s'il ne marquera sans doute pas l'histoire des émules de Lovecraft, ce « Dossier Arkham » s'avère cependant une réussite de littérature « pulp » et sans prétention, à découvrir pour se prouver que le « Mythe de Cthulhu » peut encore susciter de bonnes pages de lecture.
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