Comuna 13 - Philippe Ward
/image%2F0760971%2F20210416%2Fob_e46ac5_lester.jpg)
Loin de ses montagnes et de ses ours, Philippe Ward nous propose avec « Comuna 13 » un voyage mouvementé en Colombie, entre les derniers soubresauts de la guérilla et le souvenir tout récent des fameux cartels de la cocaïne, dont Medellín était l'épicentre. Fidèle à mon habitude, je ne vous résumerai pas l'intrigue de ce roman nerveux et dynamique, d'autres chroniqueurs l'ont fait avant moi, souvent avec talent. Je préfère évoquer le réel plaisir éprouvé lors de cette lecture.
Tous les ingrédients sont réunis dans ce livre pour renouer avec la tradition du parfait roman populaire : une bonne dose d'exotisme, relevée d'un zeste d'érotisme, des adversaires patibulaires, redoutables sans se montrer stéréotypés, des héros malgré eux qui se sortent des difficultés grâce à des alliés parfois improbables, une chasse au trésor... Ajoutez à cette composition un style direct qui ne s'attarde jamais sur le superflu, et vous obtenez une recette parfaite pour un récit qu'on ne lâche pas avant la dernière page !
Les personnages sont suffisamment fouillés pour ne pas devenir caricaturaux, Philippe Ward prend le temps de leur fournir un passé, des traits de caractère qui nous les rendent attachants, et cette volonté d'accorder de l'épaisseur à ses acteurs parvient à nous accrocher aux destins croisés et souvent contrariés des différents protagonistes. Ainsi, au fil des pages, Maribel et Sébastien, nos deux héros, deviennent des figures familières, incarnées, que l'on suit avec plaisir et pour lesquelles on tremble et on s'émeut.
En plus de toutes ces qualités, la vraie plus-value de « Comuna 13 » reste le réalisme des descriptions de la Colombie en général, et de Medellín en particulier : Philippe y a séjourné, et cela se ressent à travers l'évocation des lieux. Sans jamais se montrer pesant, l'auteur parvient au travers de courtes notations, d'anecdotes choisies, à nous faire partager son attrait pour cette région du monde méconnue, mais qui en devient attirante et passionnante grâce à son talent. Je vous rassure, nous n'avons pas droit à de longues digressions d'ordre politique ou géographique. Tout est dépeint à petites touches, sans longs passages encyclopédiques tirés du Ouèbe : Philippe Ward possède assez son métier et son sujet pour savoir alterner les moments d'action pure et les courtes pauses évoquant les paysages exotiques traversés, nous offrant aussi des aperçus révélateurs sur le contexte social et historique de la Colombie, à travers les interactions avec des personnages secondaires souvent truculents.
Comme ses héros, le pays leur servant de cadre devient ainsi autre chose que de simples mots sur le papier : une réalité concrète, presque palpable, permettant une véritable évasion, et c'est, finalement, tout ce que le lecteur demande à un roman populaire !
En conclusion, « Comuna 13 » s'inscrit bien dans la lignée de l'oeuvre de Philippe Ward : une littérature sans prétention, mais pas sans qualité, destinée à la distraction mais vouée à l'action, solidement charpentée et bénéficiant d'un parfum de vécu irremplaçable. Le seul bémol que j'ajouterai reste que, comme la fin du roman demeure ouverte, le lecteur peut ressentir un pincement de frustration...
Alors, Philippe, à quand la suite ? Dis, c'est encore loin, L'Eldorado ?
Commenter cet article