Paris Zombies et Les épouvantails - Philippe Morin

Publié le par Zaroff

 

Les épouvantails sont une métaphore, l'image du malaise des paysans, la solitude des campagnes et le rejet de certains envers les citadins, les femmes pécheresses, le matérialisme. D'autres ruminent et d'autres ruminent et passent à l'acte. C'est le cas des frères Neumance. Une jalousie sourde qui amène la vengeance et la barbarie. Ce récit qui s'apparente plus à une novella par son format est terrifiant. Non par la description facile d'actes odieux que des auteurs utilisent aisément dans le gore. Ici, tout est parsemé d'un trouble latent à la manière d'un Corsélien au meilleur de sa forme. Le renoncement et la folie. Un gendarme qui se cherche dans une vie insipide. Solitude et frustration. Puis on bascule dans une ambiance digne d'un Jack Ketchum. La scène de l'étable donne froid dans le dos, un long cauchemar où l'auteur exprime tout son talent. Et c'est également une fin abrupte aux multiples questions (le rôle du garagiste par exemple) et le sort réservé aux suppliciés. On pourrait qualifier ce court roman de survival rural, mais c'est plus complexe. Il comble les trous d'existences artificielles par des réactions sordides et primitives où la famille ne représente que des valeurs solitaires entre l'adultère, la convoitise, l'affirmation de soi et la vanité. Et les frères Neumance ne le supportent plus. Et ils vont nous le faire savoir.

Cet ouvrage comporte aussi quelques nouvelles tendance post-apo (je pense à ce vieux qui retourne mourir chez lui en parcourant des terres dévastées...), zombis, SF, polar, guerre d'Algérie et une longue novella pour parachever le tout.

 

Paris Zombies est un recueil regroupant trente-neuf récits. Les textes peuvent se lire séparément. Malgré tout, ils forment un ensemble cohérent. Paris subit une vague d'épidémie. On distingue deux sortes de morts-vivants : les contaminés et les cadavres revenus à la vie (les revenants). C'est un grand théâtre de scènes macabres et il est intéressant de voir les diverses réactions face à la survie de chacun. Certains se regroupent pour combattre ce fléau, d'autres en profitent pour assouvir leurs pulsions les plus viles : viols, pillages, domination sur les faibles. La cruauté n'a plus de visage, que ce soit envers les morts-vivants ou les rescapés. On y trouve aussi de la solidarité, de l'entraide. D'autres se réfugient dans la solitude, certains optent pour le suicide. Ce livre est un formidable kaléidoscope des sentiments et réactions face à l'innommable. L'auteur explore et dépeint l'humanité mourante dans un style vif, percutant et presque poétique. Une horreur protéiforme et obsessionnelle. Le tout dans des décors multiples : des avions, des caves, des ruelles, des parkings souterrains, des appartements vides, des magasins, des bistrots, des cimetières, des hôpitaux...

 

Lire notre interview de l'auteur.

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