Seppuku - Romain d'Huissier

Publié le par Zaroff

 

Je n'y connais quasiment que dalle en références asiatiques. Ma culture dans ce domaine se résume aux films de Bruce Lee et aux bouquins de Suzuki (Ring). J'ai donc abordé ce quatorzième opus avec une virginité assumée. J'ai eu le plaisir de rencontrer l'auteur lors d'un salon à Angers et c'est toujours une joie de chroniquer un confrère de TRASH.

Tout commence sur la vaste plaine d'Okigara. Des cadavres jonchent le sol à perte de vue, dans la boue et le sang. Un carnage abominable s'y est déroulé lors d'un exercice opposant un clan unique de samurais : le clan Asawaga. Naigo Kurogane est dans un piteux état. Son bras gauche est à moitié arraché au niveau de l'épaule, jambes tordues et hérissées de fragments osseux, longue plaie ouverte lui ouvrant le ventre. Seul son bras droit est valide. Kurogane est le seul survivant de l'effroyable massacre de ses compagnons.

Auparavant, le clan avait investi la plaine afin de s'y livrer à des combats militaires et prouver sa puissance guerrière. En tête de cortège, cinq inconnus barrent le chemin des troupes, adossés à un arbre. Le vénérable général Himura Kirise se fait décapiter par un lourd naginata en venant leur adresser la parole. Puis ce sont de puissants tentacules qui surgissent du dos des mystérieux guerriers, signal d'un assaut terrible et d'un chaos indescriptible.

Recueilli par un sorcier onmyôji, Abe no Seimei, Kurogane devient un shikabane, un mort-vivant aux veines remplies de cendre. Il va devoir combattre les cinq guerriers qui ont vendu leur âme en échange de dons surhumains, les Oni de Nagaki. L'âme de Kurogane est en sécurité dans une jarre protégée par des glyphes.

Le samurai se retrouve équipé d'un Himei (sabre maudit et arme démoniaque qui corrompt l'âme de son porteur), d'un talisman de protection pour les blessures et un shikigami (grue de papier plié) pour lui ouvrir la voie. Kurogane part à la rencontre de son destin.

Vous l'aurez compris, ce bouquin est truffé de références ancestrales sans que cette documentation riche ne nuise à l'intrigue. Le style de l'auteur est d'une remarquable qualité littéraire et hisse le gore à un niveau rarement atteint. D'une belle prouesse visuelle et narrative.

Moines-guerriers décimés, viol des prêtresses d'Amaterasu, massacres à l'Auberge du Cerisier bleu... Kurogane poursuit sa traque, lien karmique avec les exactions des Onis. Il revit et subit les châtiments perpétrés par les cinq monstres qui tentent de faire revenir un démon. Guidé par l'esprit de papier, sabres en mains et accompagné d'une prêtresse, Kurogane envoûtera le lecteur par des combats épiques dans cette traversée d'un Japon féodal et mystique. Roman atypique de la collection TRASH, mais essentiel. Romain d'Huissier prouve, à lui seul, que le Gore peut être beau, onirique, poétique et flamboyant à travers l'innommable. Comme un souffle de vie.

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