Ravage - René Barjavel

Publié le par Zaroff

 

Quel funeste avenir nous présente BARJAVEL dans son premier roman paru en 1943 mais commencé en 1939 (et achevé le 6 septembre 1942). Tous les revêtements divers sont en plastec (voire plastec caméléon pour les statues), Paris est défiguré (notamment le Vieux Montmartre), les artistes sont subventionnés, la nourriture est chimique et transformée mais les êtres sont les mêmes ! Vils et ambitieux. Les défunts sont conservés dans des vitrines dans le salon du commun des mortels. La Compagnie de Préservation des Défunts s'occupent de leur entretien, ainsi les générations conservent un souvenir visuel de leurs aïeux.

Barjavel se souvient : "Robert Denoël était devenu un ami. C'est lui qui a fait de moi un écrivain. En 1939, je lui avais apporté le manuscrit du roman qui devait s'appeler Ravage et auquel j'avais voulu donner comme titre : Colère de Dieu. (...) Il n'a pas aimé le titre, Colère de Dieu. Il a quand même lu le manuscrit dans la nuit et, le lendemain, il a consacré sa matinée à me montrer quels étaient mes défauts et mes qualités. Il a remplacé le titre par celui de Ravage. J'étais jusque là un journaliste, il a fait de moi un écrivain. En cette matinée, il m'a appris mon métier. C'était un homme fantastique. À part Céline, tous ceux qui sont passés chez lui lui doivent quelque chose de leur talent. Denoël était un éditeur dans le grand sens du mot."

Ravage se décline en quatre parties :

Les Temps Nouveaux est la présentation des personnages, les statuts sociaux et le lieu : Paris en 2052. François Deschamps est l'acteur principal. 22 ans et étudiant en école de chimie. Il est fort et possède des origines paysannes dans le Sud de la France.

Son amie d'enfance (qu'il retrouve à Paris) est Blanche Rouget, jeune femme de 17 ans devenue la vedette d'un spectacle radiophonique de la station Radio-300 que dirige le richissime et puissant Jérôme Seita. Blanche se fiance avec son Patron qui, pour se débarrasser de François, le fait recaler du concours de chimie dont il était à l'origine le major de la promotion.

Ce roman apocalyptique fait évidemment penser à Malevil de Robert Merle, Sécheresse de J.G Ballard et diverses anthologies sur le thème de la fin du Monde.

La Chute des Villes annonce l'apocalypse à venir. L'Empereur du Continent Africain déclare la guerre à l'Amérique du Nord. Le jour même de son annonce radiophonique, Paris est coupé de toute énergie, mettant ainsi les habitants dans le désarroi. Mais vous connaissez l'Homme dans la difficulté ! Sans civilisation, son instinct primaire reprend le dessus ! L'horreur commence exponentiellement. Des vieux sont balancés dans le vide (plus d'ascenseurs), les vêtements tombent (les coutures tenaient électro-magnétiquement) et beaucoup se retrouvent nus, le Gouvernement est divisé, le Ministre de la Guerre ressort les baïonnettes car les armes ne fonctionnent plus... mais le Ministre de la Médecine Gratuite et Obligatoire est plus alarmiste : que vont devenir les soixante-dix millions de morts privés de conservation et qui commencent à dégeler dans leurs vitrines ? François forme une bande, un clan où les hommes survivent en se battant pour de la nourriture, de l'eau et de l'espoir. François devient le chef incontesté d'un petit groupe. Ils se déplacent lentement et sortent de la périphérie et rejoignent la campagne. Les scènes dantesques se suivent et se ressemblent.

Le chemin de cendres est un chemin de croix. Un immense brasier ravage les villes et les campagnes environnantes. L'odyssée se parsème de morts, de péripéties mouvementées à travers les flammes, les forêts détruites, les crevasses, les animaux apeurés et affamés. Le constat est terrible car l'eau manque cruellement et les chevaux succombent un par un. François envoie un homme à la quête du précieux liquide.

Le Patriarche est nettement plus mystique ! La femme du groupe enfante dans un coin de paradis. Ils arrivent enfin dans le Sud et s'organisent. Des années passent et François a dix-sept enfants. A l'âge de 129 ans, l'autorité de François s'étend sur "toute la région limitée à l'ouest et au nord par le Rhône, à l'est par les Alpes et par la Méditerranée au Sud." La polygamie est obligatoire.

On peut déplorer une fin un peu trop "new-age", un peu trop spirituelle, un peu trop paternaliste ("travail-famille-patrie") mais les descriptions (lieux, personnages, actions, pensées...) sont remarquables et dénotent déjà l'exceptionnel talent de narration de Barjavel.

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L
Un grand classique de la SF post-apocalyptique. Je lui préfère quand même "Malevil" de Robert Merle.
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